La Dirofilariose ou Vers du Coeur

LA DIROFILARIOSE

OU VERS DU COEUR 

 

 

Appelée maladie des vers du coeur chez le chien et chez le chat, la Dirofilariose est une pathologie grave et peu connue qui s'étend chaque année. Vous habitez ou vous vous déplacez dans le Sud de la France, dans les DOM TOM, le Sud de l'Europe, aux Etats Unis ?

 

Lisez cet article pour connaître les moyens de prévention et les risques de cette maladie pour vos animaux et pour l'homme.

Que sont les vers du coeur du chien et du chat ?

 

 

  La Dirofilariose cardiaque : définition

 

La Dirofilariose cardiaque est la maladie provoquée par Dirofilaria immitis.

Ce parasite est un ver de type filaire (ver long et fin comme un spaghetti) qui se développe dans le système cardiovasculaire de l'animal parasité.

Elle touche essentiellement les canidés (chiens domestiques ou canidés sauvages) mais peut, également, atteindre les chats et les humains (zoonose).

Ces vers parasites se logent dans les artères pulmonaires et débordent souvent dans le coeur par leur nombre et leur longueur. C'est pour cette raison qu'on les appelle, plus communément, "vers du coeur".

Le nombre de ces vers, dans les artères pulmonaires et le coeur, peut aller de 1 minimum à plus de 250 pour les fortes infestations.

 

Vers du coeur du chien et du chat : cycle et contamination

 

    La transmission :

se fait par des moustiques (Anophèles, Culex) chez le chien, le chat et accidentellement chez l'homme.

Voici un schéma du cycle du parasite (Dirofilaria immitis) pour vous aider à comprendre son fonctionnement.

Les filaires adultes peuvent vivre dans le coeur du chien ou du chat pendant plusieurs années (5 à 7 ans chez le chien et 2 à 3 ans, lorsqu'elles atteignent ce stade, chez le chat).

Les microfilaires survivent peu ou pas chez le chat. Donc, la recontamination des moustiques via le chat est très rare.

A noter : Ces larves peuvent passer de la mère au chiot via la barrière placentaire. Elles ne donneront pas de vers adultes car elles doivent d'abord passer par un moustique pour se développer. La contamination d'un chiot jusqu'au stade adulte des vers se fera donc directement par les moustiques.

 

    La répartition géographique:

2 facteurs interviennent dans la répartition de la maladie :

La localisation des moustiques qui se multiplient davantage par temps chaud et humide. On retrouve, donc, la Dirofilariose des zones tempérées chaudes aux zones sub-tropicales et tropicales. Elle touche tous les continents.

La présence d'hôtes définitifs et leur déplacement (chiens domestiques, sauvages, autres canidés tels que coyotes, loups, renards, ...).

En raison du réchauffement climatique actuel et des déplacements accrus des populations canines, la Dirofilariose est en pleine extension (par le nombre de cas et la surface géographique ).

Elle s'étend en France de façon endémique dans le Sud et dans les DOM-TOM, de façon sporadique dans d'autres régions (chiens ayant séjourné dans le Sud). Elle est présente également en Italie, au Portugal, en Grèce, en Espagne, Croatie, Bosnie, République tchèque, Turquie, Hongrie, dans tous les Etats Unis, Canada, en Amérique du Sud, au Japon.

 

    La saisonnalité:

Dans l'hémisphère Nord, le pic se situe en Juillet et en Août. Plus on descend au Sud plus la durée de la période à risque augmente.

En France métropolitaine, dans le Sud, on considère que cette période s'étend sur 6 mois : grosso modo de fin mars/début avril à fin octobre.

Dans les régions subtropicales (Sud des Etats-Unis par exemple), toute l'année est à risque !

 

 

  Vers du coeur (chiens et chats) : symptômes

 

La Dirofilariose est une maladie grave ! On l'imagine assez bien quand on sait que des vers n'ont rien à faire dans les vaisseaux et dans le coeur.

 

    Symptômes de la Dirofilariose chez le chien

L'accumulation de vers entraîne inflammation et obstruction des artères pulmonaires qui provoque, à son tour, de l'hypertension pulmonaire. Lorsque les vers adultes sont nombreux et débordent largement dans le coeur, un phénomène de destruction de globules rouges aggrave la situation.

L'importance des symptômes est corrélée au nombre de vers. On distingue ainsi 4 phases chez le chien (le nombre de filaires auquel on les relie est une moyenne) :

* Stade I : Peu de vers ( moins de 10 ).

Pas de symptômes

* Stade II : On la constate pour une charge de 10 à 50 vers.

Toux et possible intolérance à l'effort.

Il peut commencer à y avoir des changements sur les radios thoraciques.

* Stade III : Nombre de vers plus important allant de 50 à 100 vers.

Difficultés respiratoires (Dyspnée). L'effort n'est pas supporté.

Signes possibles d'insuffisance cardiaque droite > ascite ("eau" dans le ventre), épanchement pleural (plèvre).

* Stade IV : Très grand nombre de vers > 100.

Les vers débordent largement dans le coeur et gênent, indirectement, l'arrivée du sang dans le coeur par la veine cave.

On a ce qu'on appelle un syndrome cave avec de nombreuses défaillances.

Les hématies (globules rouges) explosent et libèrent leur hémoglobine dans le sang (hémoglobinémie), dans les urines (hémoglobinurie), sous la peau (ictère appelé aussi "jaunisse").

Hépatomégalie ( = gonflement du foie) et insuffisance cardiaque sévère avec souffle allant jusqu'à la décompensation et la mort rapide si on ne peut pas retirer les vers qui bouchent tout.

Chez le chien, c'est un ensemble de circonstances cardio-respiratoires directement liées à la gêne mécanique qui entraîne la mort.

 

    Symptômes de la Dirofilariose chez le chat

Ayant plus de facilités à éliminer les larves ainsi que les filaires mâtures, le chat est beaucoup moins touché par cette contamination des vers du coeur. Pour autant, les conséquences ne sont pas moins graves et le risque de mort subite est plus grand que pour le chien.

3 situations possibles pour le chat :

* L'élimination asymptomatique

Même si ça peut prendre jusqu'à 3 années, un grand nombre de chats (environ 62% d'après une étude sur le sujet) élimine les vers et ne manifeste aucun symptôme.

* Le chat avec symptômes de Dirofilariose qui récupère

Dyspnée (gêne respiratoire) qui peut ressembler à une bronchite chronique par réaction immunitaire face aux vers.

Toux et sécrétions sanguinolentes éventuelles (hémoptysie)

Des troubles digestifs (vomissements, diarrhées) et une possible perte de poids.

On constate que ces symptômes peuvent persister chez le chat même après qu'il ait éliminé les vers adultes ou leurs larves.

*Le chat qui décède

Le décès du chat n'est que très exceptionnellement lié à une insuffisance cardiaque comme chez le chien. En effet, vu son système de défense, il est rarissime d'avoir de nombreux vers adultes dans son coeur.

1er cas : Dégradation respiratoire et apparition d'un oedème pulmonaire qui entraînent une détresse respiratoire pouvant aller jusqu'à la mort.

2ème cas : La mort subite ! Nettement plus fréquente chez le chat que chez le chien ! Elle peut survenir avec 1 seul ver et chez un chat totalement dépourvu de symptômes. Ce phénomène n'est pas bien expliqué et pourrait être du à une forme d'allergie.

 

 

  Diagnostic des vers du coeur chez le chien et le chat

 

Le diagnostic n'est pas évident et nécessite, souvent, le croisement de plusieurs examens complémentaires. Cela peut être coûteux mais nécessaire !

 

    Les examens sanguins

*Analyse biochimique

Courante en médecine vétérinaire, elle permet de vérifier les fonctions organiques (reins, foie, pancréas...). On peut observer des changements notables dans le cas d'une Dirofilariose mais rien qui ne soit spécifique et diagnostic de la maladie.

Rapidement, le vétérinaire peut juger de l'état général du chien ou du chat et rejeter ou confirmer toute autre maladie compatible avec les symptômes relevés.

 

* Sérologie

Très spécifique, elle permet de trahir la présence des vers de 2 façons : soit en recherchant des morceaux propres aux parasites (antigènes), soit en recherchant des traces de réponse immunitaire à ces mêmes parasites (anticorps).

Les faux positifs sont très rares mais on peut avoir des faux négatifs même sur une forte infestation. Cela est du au fait que 20% des chiens infestés n'ont pas forcément de microfilaires dans le sang (forme occulte de Dirofilariose) et que pour 1% des chiens infestés, on ne peut pas retrouver d'antigènes du parasite.

D'où l'intérêt de coupler les examens complémentaires voire de coupler les 2 types de sérologies.

 

  Important : Pour des raisons spécifiques au cycle du parasite et aux tests eux-mêmes, on ne fera ces tests que minimum 7 mois après la période d'exposition. C'est à dire, qu'un chien exposé jusqu'au 31 août de l'année en cours, ne devra être testé qu'à partir du 1er avril (7 mois) de l'année suivant.

Pour cette même raison, on ne testera jamais un chiot ayant moins de 7 mois. Ce serait totalement inutile !

 

    La radiologie pulmonaire

Il n'est pas facile de déceler les vers dans les artères pulmonaires même si cela est possible parfois. Les radios thoraciques peuvent être réalisées pour estimer l'importance des lésions pulmonaires.

C'est souvent le motif de toux persistante qui amène le vétérinaire à pratiquer cet examen.

 

    L'échocardiographie

Lorsque le nombre de vers est important, ceux-ci débordent dans le coeur et deviennent visibles avec un échographe. Ceci constitue un diagnostic de certitude. Cependant, si le nombre de vers est trop faible, leur localisation dans les artères pulmonaires les cachera de la sonde.

L'échocardiographie permettra, par ailleurs, de vérifier l'état du coeur et d'avoir une idée de l'importance de l'hypertension pulmonaire.

 

 

  Traitement de la Dirofilariose chez le chien et le chat

 

    Traitement médicamenteux des vers du coeur

Le traitement contre les vers du coeur nécessite une stratégie double : il faut tuer les vers adultes (filaires) et les larves (microfilaires).

Plusieurs molécules peuvent être associées :

La Mélanasarmine (à éviter chez le chat) pour tuer les formes adultes.

- Injections intramusculaires douloureuse pouvant être accompagnée d'anti-inflammatoires et d'un suivi (risque de réactions organiques à la mort des vers).

- Durée moyenne : les injections sont réparties à 1 mois d'intervalle.

La famille des Lactones Macrocycliques (Ivermectine, Milbémycine oxime, moxidectine, sélamectine,..) pour tuer les microfilaires.

- Formes orales et injectables.

- Durée : 6 à 12 mois voire jusqu'à 2 ans pour l'ivermectine. La Milbémycine oxime semble la plus efficace.

- Suivi nécessaire sur les 12 heures après la 1ère administration car risque de réactions organiques à la mort des filaires pouvant aller jusqu'à la défaillance cardio-vasculaire grave.

- Suivi accru sur les races de type Colley et Shetlands très sensibles à cette famille de médicaments même si il n'y a généralement pas de soucis aux doses courantes utilisées ici.

Un antibiotique adapté

- L'usage de doxycycline est recommandé pour tuer un type de bactérie (Wolfbacchia) associé au développement des vers du coeur.

- Durée : 1 mois.

Important : Les molécules sont données à titre indicatif. Le vétérinaire adaptera le traitement au regard de chaque situation (état de l'animal, possibilités de traitement, coût...).

 

    Traitement chirurgical des vers du cœur

L'extraction chirugicale des filaires peut être tentée lors de très fortes infestations entraînant un syndrome cave chez le chien. Cela consiste à passer par la veine jugulaire (niveau du cou) et à retirer les vers avec une pince spéciale, idéalement en s'aidant d'une technique radio pour le guidage (la fluoroscopie).

Technique coûteuse et non dénuée de risque, je ne sais pas si elle est pratiquée en France (un confrère de passage ici pourra m'informer). Mais c'est parfois la dernière chance !

Cas issu de l'université Davis (USA) par le Dr Mark D. Kittleson (photo ci-dessous)

 

 

    Vers du coeur (Dirofilariose) : la prévention

 

La prévention, toujours privilégiée sur Conseils Veto, est la voie incontournable pour éviter ces gros soucis évoqués précédemment.

 

 

    Ce qu'il faut savoir

Les chiens errants et canidés sauvages constituent des réservoirs de la maladie et sont peu gérables.

La lutte anti-moustique est fortement recommandée à l'échelle des communes mais aussi de vos extérieurs.

Faites en sorte de limiter les zones ou objets collectant l'eau à l'air libre dans lesquels les moustiques pourraient pondre.

Pour les chats, les garder enfermés chez vous n'est pas suffisant car près d'1/3 des chats infectés vivent en intérieur.

Utiliser colliers ou pipettes anti-parasitaires avec action sur les moustiques est fortement recommandé mais ne garantit pas une absence de contamination à 100%

 

    Gestion de la prévention médicale

On utilise les molécules de la famille des lactones macrocycliques correspondant à des vermifuges vétérinaire pour chien et chat.

On peut commencer dès l'âge de 8 semaines chez le chiot et le chaton.

Les doses pourront être mensuelles (formes orales ou locales de type spot-on) ou semestrielles (certaines formes injectables).

La fréquence et la stratégie dépendent de la région concernée (tempérée chaude, subtropicale,...) et du mode de vie.

Ainsi en zones subtropicales, le traitement recommandé se fera toute l'année.

Pour le Sud de la France et les zones tempérées, on s'adapte à la saisonnalité avec 2 cas de figure :

 

* Le chien vit à l'année dans la zone à risque

On le traite toute la saison en commençant 1 mois avant celle-ci (mi mars/début avril ) et jusqu'à 1 mois après celle-ci (fin octobre) pour pallier aux variations climatiques. Pour faciliter le suivi, il vous sera, peut être même, recommandé de vermifuger 1 fois par mois toute l'année.

 

* Le chien vit hors zone et passe un séjour dans celle-ci (vacances)

On se fixe sur la date d'arrivée sur place et on compte 1 mois pour donner la première dose. Ensuite, renouvelez 1 fois par mois jusqu'à ce que vous ayez donné 2 doses chez vous (protocole sécuritaire).

 

Pour l'exemple :

On va dire que vous arrivez en Camargue le 1er juillet pour les vacances. Le 1er août vous allez donc donner une dose :

Soit vous êtes rentré(e) et,dans ce cas, vous renouvelez la dose le 1er septembre avant d'arrêter (ça fera 2 doses à domicile 1er août et 1er sept).

Soit vous êtes encore sur place et, dans ce cas, vous renouvelez le 1er septembre. Vous serez probablement rentré(e) et donc la 2ème dose à domicile tombera le 1er octobre puis vous arrêtez le protocole.

Lorsque vous avez fini le protocole, reprenez votre rythme de vermifugation courant (vu avec votre véto).

Il peut être recommandé de faire une sérologie antigénique avant la première prévention et, ensuite, à chaque printemps pour contrôler d'éventuelles failles dans le protocole.

Par ailleurs, on utilisera également des pipettes ou colliers antiparasitaires actifs contre les moustiques lorsqu'on vit ou qu'on descend en vacances dans les régions concernées.

 

 

  La Dirofilariose chez l'homme (zoonose)

 

La contamination de l'homme est purement accidentelle mais existe surtout dans les zones endémiques (foyers développés de la maladie).

On en trouve des cas aux Etats Unis, en Espagne, en Italie, dans le Sud de la France et en Corse (35 pays au total).

Cela reste tout de même relativement rare ou sous diagnostiqué. On compte 5 à 10 cas reconnus en France chaque année.

L'homme est plus souvent touché par la Dirofilariose cutanée que par la Dirofilariose cardiaque.

 

    Dirofilariose cutanée (Dirofilaria repens) chez l'homme

On n'en a pas parlé ici mais il existe une autre Dirofilariose qui se transmet, elle aussi, par les moustiques.

Elle touche aussi bien le chien que le chat. Très répandue dans le Sud de la France, elle touche même plus souvent ces animaux que la Dirofilariose cardiaque.

Le mode de développement est similaire mais tout se passe au niveau de la peau. La plupart du temps, il n'y a aucun symptôme. Lorsqu'il y en a, on constate de fortes démangeaisons (prurit) et des lésions cutanées rouges et sans poils liées au grattage et léchage. On trouve ces lésions plutôt dans les régions postérieures et ventrales du corps.

Chez l'homme contaminé, il y a aussi érythème (rougeur), prurit, oedème. La réaction inflammatoire peut être confondue avec un kyste ou une petite tumeur bénigne qu'on retire parfois chirurgicalement pour rien.Dirofilariose cardiaque chez l'homme

La contamination est purement accidentelle et inadaptée au parasite.

Elles ne se développent pas comme chez le chien et n'atteignent pas le coeur de l'homme.

Par contre dans leur cheminement, elles peuvent venir s'enkyster dans les poumons ou dans l'oeil (cf photo ci-dessus). Un cas d'enkystement testiculaire a même été diagnostiqué chez un homme a qui on retiré le testicule !

Le souci est que le kyste formé peut être suspecté de kyste tumoral et entraîner une opération pas forcément utile au final !

 

J'espère que cet article sur la dirofilariose et les vers du coeur du chien et du chat vous aura intéressé(e) et incité(e) à protéger vos animaux.

Pensez à partager via vos réseaux sociaux le lien vers cet article auprès de vos amis et vos proches ayant des chats et des chiens ! Cela leur rendra sûrement service et évitera de gros problèmes à de nombreux animaux.

Rédacteur de l'article

Dr Eric TRÉNEL - Vétérinaire

Diplômé de l'École Nationale Vétérinaire de Lyon en 2003

 

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  Cette rubrique ne remplace pas les conseils et les soins professionnels d1 vétérinaire. Merci


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